croissance et mondialisation

Publié le par mathieu

Plan du cours :

1- Un « trend » séculaire : la croissance économique.

2- Les économies-monde successives.

3- Mutations des sociétés

Introduction :

Pour comprendre la période historique que l’on va étudier cette année (un vingtième siècle « élargi »), il faut en dégager la perspective générale sur le temps long de l’histoire humaine. Deux choses frappent immédiatement :

- la croissance démographique. Cf thème introductif de seconde. Au début de notre ère, l’humanité compte 250 millions habitants, en 1800, 1 milliard, en 1900, 1,5 milliard et en 2010 presque 7 milliards.

- l’autre phénomène majeur, directement lié à celui-là, concerne la croissance de la richesse. C’est la question posée par Malthus. Les économistes mesurent la richesse produite par un pays en un an grâce à un agrégat, le Produit Intérieur Brut exprimé en unités monétaires. La notion est complexe : que faut-il agréger ? que fait-on des richesses non exprimées en monnaie ? Elle a au moins le mérite de permettre des comparaisons. Les historiens de l’économie ont tenté de reconstituer l’évolution du PIB non pas tant dans l’espoir d’être exact que de proposer des ordres de grandeur.

On propose alors le tableau de Maddisson.

1er constat : la formidable croissance, le PIB mondial est multiplié par 40 entre 1820 et 1998. La richesse a cru plus rapidement que la population, Malthus a eu tord. Alors l’humanité est-elle en marche vers le bonheur ?

2ème constat : les rythmes différents de la croissance, la période 1950-1973 étant très intense.

3ème constat : la croissance n’affecte pas les pays au même rythme.

1- Comment expliquer le trend séculaire de la croissance ?

On peut faire intervenir 4 niveaux d’explication sur le temps long (voir schéma).

1.1 : la croissance démographique :

Elle joue un rôle indéniable par l’augmentation de la main d’œuvre mais aussi de la consommation.

  • La transition démographique

On peut renvoyer ici au thème introductif de 2nde : dès le 18ème siècle, l’amélioration de l’alimentation due notamment aux meilleurs rendements agricoles (avant même les progrès de la médecine) permet de diminuer la mortalité. C’est la question de la transition démographique.

  • Une lecture démographique de la croissance

De ce point de vue, une lecture « démographique » de la croissance est possible : elle part du foyer européen où la croissance démographique est absorbée par l’industrie tandis que dans les foyers asiatiques cette croissance est absorbée par les campagnes avec une intensification du travail agricole. La croissance européenne se diffuse dans les nouveaux mondes « occidentaux » peuplés par les européens. Elle se diffuse enfin dans les anciennes périphéries et permettent leur rattrapage : des « poids lourds démographiques » comme le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine (BRIC). De ce point de vue, la rapidité de la transition peut se transformer en désavantage et la croissance de certaines régions comme l’Afrique subsaharienne semble submerger par la croissance démographique.

  • Développement et développement durable

Naturellement cette croissance économique et démographique pose le problème de la disponibilité des ressources. Cette prise de conscience est récurrente depuis Malthus mais elle s’accélère dans le champ de la montée des préoccupations écologiques. Comment concilier les questions de la croissance des richesses, de la préservation de l’environnement et du progrès social : c’est le problème de Développement Durable.

1.2 : la diffusion rapide d’innovations techniques notamment celles appliquées aux processus industriels.

  • Les phases de la diffusion

On repère le phénomène nouveau de la croissance dès le 18ème siècle, au Royaume-Uni, dans la production textile.

Exemple : la mule jenny.

Ces innovations vont conduire à l’application systématique du moteur à vapeur à l’industrie et à la naissance de nouveaux lieux de production, les usines. Dans les transports, développement du rail. C’est la première révolution industrielle (machine à vapeur, charbon, textile).

Une deuxième vague d’innovations se développe à partir des années 1880 avec la chimie, l’électricité et le moteur à explosion.

Une troisième vague se développe après 1945 avec les plastiques, l’informatique et l’automatisme.

  • Un nouveau rapport au progrès

Jusqu’alors, la production reposait sur la transmission de savoir-faire avec parfois un certain conservatisme comme dans le cas des corporations. La diffusion des innovations transforme ce regard, il y a une prise de conscience que la science, le progrès technique peuvent permettre un progrès humain, social. La modernité est valorisée plutôt que la tradition.

Exemple : Jules Vernes.

L’économie du savoir occupe une place de plus en plus importante : laboratoires de recherche intégrés aux entreprises (recherche et développement), politique d’Etat en faveur de la scolarisation, des universités.

Cette évolution n’est pourtant pas toujours consensuelle et peut se voir opposer des peurs collectives plus ou moins fantasmées.

1.3 : le capitalisme et la mise en place d’un environnement favorable à l’entreprise économique.

  • Qu’est ce que le capitalisme ?

Schéma pour rappeler A—M—A’ (capital, capitalisme, salaire, plus value, marché) dans une logique d’accumulation du capital.

Au fur et à mesure que le mode de production industrielle s’étoffe, qu’il prend en ampleur, ce schéma devient plus complexe.

La nécessité de mobiliser des capitaux de plus en plus importants, dépasse les capacités d’investissement d’une seule famille : les banques jouent un rôle croissant dans l’investissement, elles-mêmes mobilisent l’épargne, la bourse et la finance permettent de diversifier les investissements, les activités se spécialisent comme le développement de la grande distribution dans les années 60.

  • Les cycles de l’économie capitaliste

La régulation de la production se fait par le jeu de l’offre et de la demande (thème de « la main invisible »). C’est le credo du libéralisme, « laisser faire, laisser aller », éviter l’intervention de l’Etat.

Le mécanisme de base est celui de la surproduction. La crise ne nait pas comme aux périodes précédentes de la sous-production (les mauvaises récoltes des sociétés agraires provoquaient les famines) mais d’un emballement de la croissance : des investissements trop nombreux dans les branches qui présentent les meilleurs profits, un engorgement des marchés, la mévente, la chute des prix, les faillites, le chômage…

La concurrence, l’absence de régulation créent de l’instabilité et peuvent amener des crises globales.

Karl Marx développe ainsi la thèse d’une « crise finale du capitalisme » et la nécessité d’organiser l’économie sur des bases collectives, en excluant la propriété privée des moyens de productions (socialisme).

1.4 : le développement des échanges et la mondialisation

  • La croissance des échanges mondiaux

Ces échanges au long cours existent depuis longtemps mais les échanges sont très réduits et concernent des produits de luxe. L’exploitation du nouveau monde après 1492 intensifie les échanges notamment autour de l’Europe.

L’industrialisation stimule ces échanges en spécialisant des régions notamment des centres industriels et des périphéries pourvoyeuses de matières premières (métaux, produits agricoles, matières premières).

L’économie capitaliste pousse à la mondialisation et crée un échelon mondial celui de « l’économie mondialisée ». Aujourd’hui 25% de la production est échangée dans ces circuits du commerce international contre 15% en 1973.

  • Protectionnisme et libre-échange.

Mais si la croissance tire globalement profit de la mondialisation, elle génère des tensions et des inégalités spatiales : il s’agit alors pour les Etats de capter la croissance et ses flux. C’est la question des protections douanières : ai-je intérêt à ouvrir mon commerce ou au contraire à protéger mon industrie, mon agriculture par des droits de douane.

Le Royaume-Uni a été historiquement le promoteur du libre échange puis les Etats-Unis car ils se sont trouvés en position dominantes.

D’autres nations ont au contraire cherché à « protéger » leur production nationale pour ne pas être dépendants comme l’Allemagne bismarckienne (théorie de List) et surtout l’URSS après 1917 ou certains régimes nationalistes « anti-impérialistes » comme la Chine après 1949. Retour tardif au libre-échange dans les années 90.

  • Une mondialisation qui n’est pas inéluctable

La crise de 1929 a sonné le repli général des économies nationales sur elles-mêmes : effondrement du commerce mondial. Barrières protectionnistes (tarifs douaniers, législation, contrôle des capitaux).

L’ouverture des économies ne s’opère que lentement après 1945 et il faut attendre les années 80 pour réentendre des théories « néolibérales ».

2 : Les économies-monde successives

On part de la chronologie proposée aux élèves qui synthétise les grandes étapes de la croissance et on met en évidence que ces grandes étapes correspondent à des configurations différentes du capitalisme, qui font système. On se contente d’abord de cette 1ère approche de la notion « d’économie-monde ».

2.1 : l’économie-monde britannique

On part du texte de Marx sur la crise du coton.

1- Qui est Marx ? Quel rôle a-t-il joué ?

Un révolutionnaire allemand en exil à Londres après l’échec des révolutions de 1848 en Europe ; il vit notamment de travaux de journalisme, le texte est un extrait de ses articles de 1861 alors qu’il couvre la Guerre de Sécession américaine (1861-1865).

Marx est un révolutionnaire qui croit dans le « rôle historique du prolétariat », il identifie ce nouveau groupe social des travailleurs industriels comme la classe sociale capable de prendre la tête d’une révolution globale qui puisse changer l’ordre social sur un modèle communiste.

2- Quelle est la situation de l’Angleterre en 1861 ? Quelle est celle des Etats-Unis ? Celle de l’Inde ?

Le Royaume-Uni est la première puissance économique au milieu du 19ème siècle puisque 40% des exportations mondiales de marchandises sont britanniques. Le pays a bénéficié d’une entrée précoce dans la croissance moderne : révolution agricole, transition démographique (le pays passe de 14 à 31 millions d’habitants entre 1820 et 1845) et révolution industrielle dès la fin du 18ème siècle. Son PNB est multiplié par 3 entre 1820 et 1865, son concurrent français est loin derrière.

D’ailleurs la suprématie britannique est redoublée par un rôle politique majeur : le RU sort vainqueur des guerres napoléoniennes, il impose au continent européen un certain équilibre des puissances et il contrôle les mers du monde, notamment la route vers l’Inde qui est alors sa colonie principale. Il a perdu les « 13 colonies » américaines (Etats-Unis) mais conservent un rôle majeur en Amérique du Nord (Canada, colonies espagnoles et portugaises sous influence).

L’Inde est une colonie britannique conquise tout au long du 18ème siècle et durement reprise en main après la révolte des Cipayes. Son développement économique est profondément modifié par la colonisation, sa production artisanale est ruinée par les importations de textile anglais.

Les Etats-Unis sont en pleine guerre civile : les Etats Fédérés (Lincoln) qui entament un cycle de forte croissance industrielle s’opposent à la Sécession des Etats du Sud (l’Union) qui souhaitent préserver une économie agricole de grande plantation (coton, tabac) basée sur l’esclavage. Le Nord organise un blocus du commerce des Etats du Sud et le coton américain ne parvient plus à alimenter les usines anglaises.

3- Sur quoi repose l’essor industriel britannique ?

La révolution industrielle est d’abord liée à la production textile qui tire d’autres branches comme l’extraction de charbon mais aussi la construction de machines-outils.

D’autre part, l’économie britannique qui nécessite une main d’œuvre industrielle nombreuse et concentrée dans les villes, tourne le dos à son agriculture. Le Royaume-Uni comte sur son commerce pour alimenter ses marchés de consommation (thé, sucre, farine, viande…) et couvrir ses besoins en matières premières (coton, laine). Le Royaume-Uni est donc favorable au libre-échange et à la liberté du commerce et n’hésite pas à employer la force pour contraindre certains Etats à ne pas limiter leur commerce (Guerre de l’Opium et politique de la canonnière).

4- Pourquoi Marx évoque-t-il « les esclaves blancs » ? Qui sont-ils, en quel nombre ? Quelles sont leurs conditions de vie ?

Les esclaves blancs désignent les ouvriers de l’industrie textile, Marx évoque 4 millions d’individus concentrés dans les grands centres urbains de Londres et du Lancashire (Liverpool).

Ce prolétariat connaît des conditions de travail et de vie très difficiles.

La crise de 1861 accentue les difficultés matérielles avec le chômage.

Ces conditions de vie peuvent pousser à la révolte et le gouvernement britannique et les couches aisées de la société britannique tiennent les ouvriers pour des « classes dangereuses ».

5- Une économie capitaliste à échelle mondiale : quelles régions du monde sont mises en rapport les unes avec les autres ?6- Selon quelle logique circulent les marchandises ? pensez au modèle centre/périphérie.

Schéma.

Définition : une économie-monde est un espace économique de dimension mondiale, un morceau de la planète organiquement unifié par la division du travail l’échange. Son centre concentre les fonctions de commandement (incarnées par une ville) et attire les richesses (capitaux, informations, technologies) ; les périphéries sont en relation avec ce centre selon une logique de complémentarité et de dépendance qui peut se réaliser au détriment de leur propre développement voire se transformer en relation d’exploitation.

7- A quoi est due la crise économique évoquée ici ? Quels sont ses effets ?

La crise est double :

  • D’une part, les matières premières sont insuffisantes et l’industrie fonctionne en dessous de ses capacités (crise industrielle).
  • D’autre part, les prix de ces matières premières flambent et donnent naissance à des phénomènes de spéculation où l’on achète non pas pour créer de la richesse réelle mais pour revendre avec une plus-value monétaire. Ce décalage entre la réalité de la production et les signes monétaires est une « bulle ». Dans le texte, Marx pressent la fin de cette bulle et la chute brutale des prix signifiant la ruine de certains capitalistes ou des pertes. Ces phénomènes déstabilisent alors la circulation de la monnaie, le crédit… et finalement toute l’économie.

8- Montrez que Marx décrit une mondialisation qui produit à la fois de la croissance économique mais aussi des tensions.

Marx décrit une mondialisation double :

  • La Royaume-Uni a construit son modèle de croissance sur le développement industriel, la division du travail à échelle mondiale, la spécialisation de certaines régions, la constitution de nouvelles branches commerciales et de nouveaux marchés.
  • Cette organisation repose sur des difficultés internes fortes : l’exploitation du prolétariat, l’esclavage, la domination de certains peuples limitent les bénéficiaires de cette croissance. Cette croissance elle-même est fragilisée par la récurrence de certaines crises.

9- Cette critique de la mondialisation capitaliste est-elle conforme à ce que vous savez de Marx ?

Marx est un révolutionnaire internationaliste :

  • Il compte sur la crise comme facteur de déstabilisation du système à grande échelle. Pour lui, le capitalisme est une économie incapable de stabiliser le monde.
  • Il compte sur les masses exploitées (paysans indiens, esclaves noirs, ouvriers européens) pour transformer les crises et les révoltes qui sont des phénomènes négatifs en une révolution capable de refonder l’ordre social sur des valeurs d’égalité et de fraternité (« le communisme »).

Reprise : élaboration d'un schéma sur l'économie-monde britannique

Le déclin de l’économie-monde britannique

- montée en puissance de concurrent qui rattrape leur retard lors de la 2ème phase d’industrialisation (Etats-Unis, Allemagne, Japon).

- deux guerres mondiales dans lesquelles le Royaume-Uni a dû engager ses forces humaines et financières pour contenir son rival allemand.

- la crise économique de 1929 qui voit l’effondrement de la mondialisation britannique : déclin de la livre sterling face aux autres monnaies, repli sur l’empire, fin du libre-échange (1931).

- la colonisation est contestée : les dominions acquièrent leur autonomie (1932), la contestation est parfois violente (Guerre des Boers, Inde). La décolonisation aux lendemains de la 2ème guerre mondiale : Inde, Proche Orient, Afrique. Incapacité à assumer le rôle de gendarme du monde, le relais passe dans les mains des Etats-Unis.

Mais tout n’a pas disparu, il reste des vestiges de cette période : le rôle financier de la City, l’indépendance de la Livre sterling, des liens culturels privilégiés avec un monde anglo-saxon dominant, la cuisine…

2.2 : l’économie-monde américaine.

  • Extrait vidéo : Les Temps Modernes (Chaplin, 1936)

Mise en évidence des transformations du capitalisme : le taylorisme/fordisme.

La production devient de plus en plus importante alors qu’une partie de la société reste exclu de la consommation : cette contradiction est à l’origine de la Grande Dépression des Années 30.

  • Travail sur le texte de Truman : le Fair Deal.

Construction d’un schéma sur le nouveau type de régulation capitaliste : l’Etat favorise la croissance mais aussi une redistribution large des richesses de la croissance. La consommation de masse (la société de consommation, l’american way of life) tire la production et fait tourner à plein régime l’économie américaine.

L'économie capitaliste américaine se réorganise sur la base d'un modèle "fordien" : on reste bien dans le capitalisme (propriété privée) mais l'Etat et de nouveaux acteurs (syndicats, organismes de protection sociale) participent aussi, avec les entreprises, à l'organisation et à la régulation de l'économie. Ce n'est plus le libéralisme du "laisser faire, laisser aller" du 19ème siècle.

Parallèlement, les Etats-Unis assument leur leadership politique mondial (la défense du Monde Libre lors de la Guerre Froide contre le communisme) mais aussi économique : ils se donnent pour mission de remettre en ordre l’économie mondiale, les pays développés étant chargés d’investir dans les pays sous-développés pour permettre leur industrialisation et l’accès à la croissance.

2.3 : où en est l’économie mondiale ?

Quelques pistes de réflexion autour du modèle « d’économie-monde » :

  • Il n’y a plus de centre unique en position hégémonique.

L’économie américaine est concurrencée depuis les années 70.

L’économie américaine n’est plus en position hégémonique. Dès la fin des années 60, elle affronte la concurrence de ses partenaires notamment le Japon et les Etats-Unis.

1957 : signature du Traité de Rome qui met en place progressivement un marché commun entre 6 pays européens. Ce traité de libre-échange permet à des entreprises européennes de grandir sur un marché de taille continentale.

D’autre part, le modèle de régulation fordienne connaît une série de remises en cause notamment dans les pays industrialisés : montée du chômage, nouveau managment qui individualise les postes de travail et impose une gestion par le stress… La régulation macro-économique, par l’Etat, connaît elle aussi des remises en cause notamment sous les coups de politiques dites « néolibérales » qui rognent les prérogatives de l’Etat-Providence.

La fin des Etats-Unis ?

1971 : fin du système de Bretton Woods et instauration d’un système de change flottant : les monnaies ne se définissent plus seulement autour du dollar.

Pourtant, même sans être les maîtres incontestés, les Etats-Unis restent la 1ère puissance économique (15 000 milliards de dollars, 20% du PIB : la Chine et le Japon sont en 2ème et 3ème position avec un tiers de ce PIB), financière, monétaire (le dollar reste la principale monnaie de réserve et l’euro ne l’a pas remplacé) et technologique. De plus, ils restent la 1ère puissance militaire (50% des dépenses militaires mondiales).

  • Quel réseau pour la planète ?

La mondialisation

L’amélioration des transports (la conteneurisation notamment) et la généralisation du libre-échange (accords de l’Organisation Mondiale du Commerce) ont intensifié le commerce mondial. Les grandes entreprises (FMN, firmes multinationales) déploient aujourd’hui des stratégies mondiales pour s’implanter sur les marchés mondiaux et pour jouer sur les différences de coûts (délocalisation).

De ce point de vue, la mondialisation reste très inégale : 80% des richesses circulent au profit de 20% des populations, essentiellement dans les pays industriels. Trois pôles se distinguent qui constituent les principaux marchés mais aussi des aires de production : Amérique du Nord (Canada, Etats-Unis), Europe occidentale (essentiellement membres de l’Union Européenne) et Asie-Pacifique (Japon et NPI).

La globalisation financière

Mais c’est sur le plan financier que ce réseau mondial a connu l’expansion la plus importante : les grands Etats ont « dérégulé » « déréglementé » les marchés financiers c'est-à-dire qu’ils ont renoncé au contrôle, à la surveillance exercé sur les flux de capitaux. Ces capitaux circulent d’autre part à travers la planète grâce à un réseau de bourses, de systèmes informatisés qui traitent des informations en temps réel. Les grandes métropoles, des « villes mondiales », sont les centres de cette activité financière : New York, Tokyo, Londres, Paris.

On peut à cet égard parler d’une économie-monde multipolaire.

  • Des périphéries qui rebattent l’ordre mondial

Les pays émergents

La croissance, notamment dans les années 90, a permis un développement qui n’est plus le monopole des anciens pays industrialisés. Les flux de capitaux et l’accès au marché mondial ont permis la valorisation de nouveaux pays, autrefois en position périphérique et dépendante. On les appelle « pays émergents » ou BRICS.

Brésil : la « ferme du monde ». Investissements massifs des industries agro-alimentaires.

Russie : liquidation de l’héritage industriel soviétique, ressources énergétiques (gaz, pétrole) écoulées sur les marchés mondiaux.

Inde : ouverture économique notamment vers les services à tous les niveaux (centres d’appel, cinéma, informatique).

Chine : le nouvel « atelier du monde ». Ouverture économique depuis 1978, accueil d’investissements dans le montage industriel, montée en gamme.

Afrique du Sud et autres « émergents ».

Forces et faiblesses

Ces économies restent tout de même très dépendantes du marché mondial, encore plus que les anciens pays industriels : faiblesse du marché intérieur, fragilité face aux fluctuations du marché mondial.

Exemple : les excédents commerciaux chinois se traduisent par des réserves de liquidités importantes mais celles-ci sont placées dans l’achat de bons du trésor américain.

D’ailleurs si le PIB chinois est bien le 2ème du monde, le PIB par habitant est de 7 400$ (contre 45 000 pour les Etats-Unis), il est au 127ème rang mondial.


Notre système économique mondial est qualifié de multipolaire car plusieurs pôles (Etast-Unis, Triade, émergents...) organisent l'activité économique mondiale : ils sont certes concurrents les uns des autres mais ils sont surtout interdépendants les uns des autres. Cette situation est-elle amenée à durer (hypothèse d'un monde en réseau) ou, au contraire, n'est qu'une phase de transition entre une économie-monde américaine finissante et l'émergence d'une nouvelle économie-monde en Asie ?

3- La croissance transforme les sociétés : l’exemple des mutations de la société française.

Cours : les tendances générales

L’industrialisation et la croissance ont profondément transformé la société française majoritairement rurale au début du 19ème siècle, avec pour cellule de base des familles paysannes évoluant au sein de la communauté villageoise. On peut repérer trois grandes évolutions :

3.1: La transformation des activités.

Cf. document 1 page 50

  • La fin des paysans ?

Les campagnes se transforment, elles sont elles aussi touchées par l’industrialisation et la croissance générales : la mécanisation, les engrais améliorent les rendements tout en employant moins de main d’œuvre, les chemins de fer permettent la spécialisation agricole. Les campagnes ne déclinent pas mais, par contre, la paysannerie tend inexorablement à disparaître : en nombre bien sûr mais aussi par la fin de ses modes de vie particuliers.

Cf. dossier pages 52-53

  • Apogée et déclin du prolétariat industriel.

On assiste bien sûr au développement numérique du salariat industriel de 1850 aux années 1970, une condition ouvrière se dessine dans des conditions très précaires (conditions de travail, salaire, logement). Ce prolétariat déraciné et pauvre fait figure de « nouveau barbare » au sein de la société bourgeoise, il en est « exclu ». Cette identité ouvrière se renforce donc au cours de luttes sociales contre le patron mais aussi plus généralement contre les possédants, la bourgeoisie voire contre l’Etat. Cette identité peut devenir « une conscience de classe » incarnée par des organisations ouvrières « socialistes » (partis socialistes, partis communistes, CGT, CGTU). Après les années 70, le salariat industriel voit sa part diminuer dans la population active sous les coups de la désindustrialisation et son identité est remise en cause par l’affaiblissement du militantisme ouvrier notamment communiste.

Cf dossier page 48-49 sur le travail des enfants, un révélateur de la dureté de la condition ouvrière et son évolution.

Cf. cours page 54-55.

  • Une irrésistible tertiarisation

La montée du secteur tertiaire est le fait de plusieurs tendances : le développement de l’économie marchande qui multiplie les intermédiaires, le développement de l’Etat et de ses administrations. Ce secteur devient largement majoritaire (près de 3 emplois sur 4) après les années 70, une partie est constituée d’un salariat précaire et peu payé dont le travail est en grande partie imitée sur l’organisation industrielle, taylorienne du travail tandis qu’une autre au contraire, bénéficie des hauts niveaux de qualification nécessaires à une économie moderne.

3.2 : l’émergence de modes de vie et de cultures modernes.

Dossier sur les Trente Glorieuses (texte Fourastié + équipement des ménages).

Les modes de vie anciens étaient plutôt conservateurs et valorisaient la tradition, avec notamment un encadrement religieux de la famille et du village par une vie paroissiale qui marquait les grandes étapes de la vie et de l’année par la liturgie catholique.

Ces modes de vie sont remis en cause par les modifications sociologiques induites par l’industrialisation (l’acculturation des ouvriers est une source d’inquiétude pour l’Eglise dès le milieu du 19ème siècle) mais surtout par un nouveau rapport au progrès qui valorise la modernité. L’accès à la culture écrite (la presse à grand tirage), le service militaire, la scolarisation, les nouvelles pratiques politiques (suffrage universel, militantisme syndical ou politique) créent les conditions d’une « nationalisation » des masses qui adhèrent à une culture moderne dont les cadres sont au moins ceux de l’Etat national et de ses nouveaux horizons mondiaux.

Lors des 30 Glorieuses, le développement des loisirs (cinéma, vacances, musiques nouvelles) intensifient ce processus mais l’orientent vers une individualisation plus grande.

Cf. dossier pages 20-21

Les femmes redéfinissent leur place dans la société : leur accès à l’école et au marché du travail rééquilibrent leurs relations aux hommes au sein de la famille, du travail mais aussi de l’espace symbolique et politique. Cette nouvelle place permet de faire avancer la revendication de droits nouveaux (droit de vote en 1944, droits à l’avortement Loi Neuwirth 1967, et à la contraception Loi Veil 1975) mais des inégalités subsistent (salaires) et les nouveaux rapports de genre restent dissymétriques (l’image de la femme dans les médias par exemple reste au centre de polémiques).

3.3 : 150 ans d’immigration en France

Lire le résumé de cours dans le manuel page 64.

Travail sur l’exemple des mineurs marocains.

conclusion : Quelle particularité pour la France ?

Ces transformations ont touchées toutes les sociétés industrielles, la France également mais plus tardivement (le droit de vote est très tardif comparé à nos voisins), plus lent (la France majoritairement reste rurale jusque 1931). On peut même parler de résistances propres à une culture plus « malthusienne ».

  • La transition démographique est amorcée très tôt avec une mortalité relativement élevée et une natalité qui chute précocement. La population française stagne autour de 40 millions d’habitants jusque la 2nde Guerre Mondiale. Le « Baby Boom » après 1945 voit la population française afficher un meilleur dynamisme démographique que ses voisins européens (65 millions d’habitants actuellement, 63 en métropole). Certains historiens, un peu par provocation, voient dans les Trente Glorieuses la véritable entrée de la France dans la modernité.
  • Le malthusianisme démographique des français jusque 1939 s’explique par le choix de limiter les naissances afin de transmettre des patrimoines non partagés au sein des familles paysannes et bourgeoises.
  • Pour lutter contre l’instabilité politique du pays, les gouvernements successifs ont valorisé la paysannerie et les classes moyennes et les ont érigées en modèle. Le protectionnisme agricole de la 3ème République, la mise en œuvre par la France de la Politique Agricole Commune au sein du Marché Commun à partir de 1957 traduisent cette volonté d’accompagner les évolutions sociales de manière très progressive.
  • L’économie-monde française a joué aussi ce rôle d’amortisseur : la colonisation de l’Algérie, les bénéfices de l’exploitation coloniale, le prestige symbolique de l’Empire colonial ont permis jusque dans les années 50 de modérer des évolutions sociales qui ont été plus brutales dans les pays industriels similaires.
  • Ce « conservatisme » français a impliqué un recours plus précoce qu’ailleurs, dès la fin du 19ème siècle, à une immigration de travail. Les réticences à intégrer ces populations nouvelles, les crispations nationalistes voire xénophobes notamment en période de crise, s’expliquent alors par un sentiment identitaire national marqué par le repli sur soi, la peur d’une menace étrangère et les angoisses devant les mutations rapides du monde.

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